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LE BLOCAGE DES RELÈVES D’ÉQUIPAGE

Tribune Libre

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11/04/2020

Nous venons de recevoir ce courrier d'un commandant, adhérent d'HYDROS, actuellement bloqué sur son navire en Algérie, sans possibilités d'effectuer des relèves. Nous savons que le président de l'AFCAN est aussi "coincé" sur son navire sans possibilité d'être relevé. Cette situation est malheureusement devenue fréquente en ces temps de pandémie Covid-19 et concerne beaucoup de marins.

Jean-Baptiste Djebbari, le ministre des transports, a pourtant déclaré que les marins faisaient partie de la deuxième ligne pour la lutte contre les effets du Covid-19. Mais dans les faits, les marins se retrouvent bien isolés sur leurs navires et peu de pays acceptent les relèves d’équipage qui en plus sont quasi-impossibles à réaliser puisque il n’y a presque plus d’avions en l’air pour arriver de son pays ou retourner chez soi.

"Le but de cette lettre n’est pas de brocarder, mais plutôt d’alimenter un débat, et de proposer quelques bases de réflexion, de manière constructive. Et donc surtout de trouver des solutions, dans « une approche pratique et pragmatique ». Dans l’espoir de contribuer à notre humble niveau, à une évolution positive de la situation." nous indique notre collègue.


Tous ceux qui souhaitent réagir ou apporter des solutions peuvent le faire, soit sur la plateforme soit à notre adresse associationhydros@gmail.com


Nous remercions notre collègue pour ce courrier.


********************



Bonjour à tous ;


Nous lisons tous que les blocages des relèves d’équipage sont au cœur des préoccupations du monde maritime, et les communications de l’ensemble des Organisations participantes sont sans équivoque à ce sujet.

En particulier, toutes s’accordent sur l’impératif fondamental qu’il y aurait à « faciliter la circulation des centaines de milliers de marins entre leurs pays et leurs navires, afin de maintenir la qualité et l’efficacité de cette chaîne d’approvisionnement, vitale pour l’économie mondiale…… »

Voilà pour les déclarations de bonnes intentions.


Pour ce qui est de l’organisation pratique des relèves, nous sommes moins abreuvés de solutions, c’est le moins qu’on puisse dire.

Mais ce n’est pas une surprise.


Néanmoins, la solidarité maritime, si souvent évoquée, et dont bon nombre d’acteurs de la filière se félicitent, nous amène à la réflexion suivante.


Un des nombreux blocages – et ce n’est pas le moindre – réside dans l’interruption des liaisons aériennes. 

Nous n’avons aucun espoir d’une reprise de ces liaisons à court terme.  

Court terme s’entend inférieur à 6 mois bien sûr…… ! 

Et quand bien même, au terme des 6 mois (ou 9 ou 12…), qu’est-ce-qui aura changé… ? Les belles intentions peut-être ?...


On pourrait imaginer – sans négliger les contraintes – que les liaisons maritimes actives – non dédiées aux passagers s’entend, puisque ces dernières sont aussi suspendues – permettent l’acheminement des marins vers les ports d’embarquement sur leurs navires, et le rapatriement des débarquants vers leur pays d’origine. 

Un pont maritime en quelque sorte, à l’image des ponts aériens organisés parfois, dans les situations exceptionnelles. N’est-ce pas le cas aujourd’hui?


Nombreux sont les navires sous pavillon français (ou gérés par des armateurs français) à relier la métropole aux pays non Européens, et Africains en particulier.


Mon navire est stationné en Algérie, mais les navires de l’offshore pétrolier dans le Golfe de Guinée ou de la pêche en Océan indien, sont confrontés à la même problématique. Et beaucoup d’autres, ailleurs aussi.

Sans possibilité de circulation pour leurs équipages.


Vous me direz si cette idée vous paraît saugrenue, fantaisiste, utopique, irréalisable… Ou pas. 


Je ne présume pas un seul instant des difficultés engendrées à tous les niveaux, par cette suggestion.

Ce n’est pas une mince affaire, à fortiori dans les pays Africains !


Il va de soi que toutes les garanties sanitaires, réglementaires, logistiques etc…etc…devraient être assurées, à tout moment et en tout lieu, en particulier sur les navires porteurs. 

Je ne néglige pas l’existence des énormes difficultés et obstacles, qui ne manqueront pas de surgir.


Évidemment, tous les étages hiérarchiques des compagnies de navigation respectives devront y être favorables, mais cela ne suffira pas.

Il faudra viser encore plus haut, via Armateurs de France, le RIF, la DAM, le Ministère de tutelle, et bien sûr celui des Affaires Étrangères.

Ce dernier sera seul en mesure de convaincre les autorités des pays tiers, de la pertinence d’une solution de cet ordre, et de l’impérieuse nécessité de faciliter ce type d’échange sur leur territoire. 

C’est sur ce dernier point sans doute, que les plus grandes difficultés se présenteront.


Nous pourrions aussi contacter certains appuis nécessaires, et bénéficier de relais adéquats.


Nos armateurs seront évidemment totalement impliqués et devront prendre la main sur cette organisation pratique.


Il s’agit d’une réelle opportunité pour mettre en œuvre les déclarations d’intention, vantant la volonté de garantir la poursuite de l’activité, ainsi que la solidarité du monde maritime.

Voilà une belle occasion de mettre en accord les paroles et les actes, pour les Organisations intergouvernementales, professionnelles, Administrations de tutelle, Gouvernement, au sein duquel la Diplomatie aura un rôle primordial à jouer.


On évoque ici la Marine Marchande, mais la Marine Nationale pourrait aussi s’y voir confier une mission, pourquoi pas….


En cas de succès, nombreux sont ceux qui s’en attribueraient les mérites. Et c’est tant mieux.


Certes, c’est une pratique inhabituelle, mais il a été dit que nous étions en « guerre »…..

Que l’on partage ou pas la pertinence de cette déclaration, il nous appartient aussi, à nous les marins, de proposer des issues.


Probablement, nombreux sont ceux qui qualifieront cette idée de farfelue.

Soit, mais ils devront cependant se poser les bonnes questions, eux aussi.

A situation exceptionnelle, solutions exceptionnelles.


Il n’y a pas de problèmes, seulement des solutions, ceci est notre quotidien.


Enfin n’oublions pas : « Il y a 3 sortes d’hommes : les vivants, les morts, et ceux qui vont sur la mer ».


Bien à vous.

Cordialement / Best regards / Cordiales saludos.


Thierry DUFORT


********************************


Après échange avec notre collègue, il nous a transmis un second message dont voici la partie principale :


Nous n’avançons pas réellement sur le sujet, mais ne désespérons pas. Probablement, faisons-nous preuve de l’optimisme inhérent à notre métier… ?

Mais la route est longue.

Et convaincre les intervenants susceptibles d’avoir la main, ne sera pas non plus chose facile, tant notre activité semble peu connue dans certains milieux...

Pour preuve, voici la réponse de l’ambassade de France en Algérie, aux questionnements de mon armement : 


>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> 

“ Bonjour Monsieur,


Les marins ne peuvent être considérés comme des particuliers et donc être concernés par les quelques vols commerciaux mis en place sporadiquement par Air France. Il convient de vous tourner vers le ministère de la Défense pour la mise en place d’un dispositif spécifique.

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> 


Peut-être là-bas,  ignore-t-on l’existence de marins non militaires…. ?  A méditer…


Nous espérons néanmoins, que l’ensemble des maillons de la chaîne fera preuve de qualité d’écoute, de bonne volonté et d’imagination.

Pour le moment, et à ma connaissance, force est de constater, que nous en sommes toujours au stade des suggestions…

Gageons que des solutions viennent à se mettre en œuvre rapidement.


Bon courage aux « terriens »…. De notre côté, nous avons la chance d’être « confinés » avec vue sur mer…..

Même si la mère nous manque, et les enfants aussi….. ????


Amicalement.


Cordialement / Best regards / Cordiales saludos.


Thierry DUFORT

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