Voici un message du président de la Section des gens de mer de l'ITF (la Fédération internationale des ouvriers du transport) , David Heindel , adressé aux marins.
Ce message s’adresse à tous les affiliés des gens de mer de l’ITF et à chacun de leurs membres – ces marins qui travaillent avec professionnalisme et dévouement en cette période inédite et incertaine.
Merci de continuer à transporter les produits essentiels et d’assurer la continuité des échanges commerciaux mondiaux en cette pandémie de Covid-19. Sans votre sacrifice et celui de nombreux autres travailleuses et travailleurs des transports, le monde se trouverait dans une situation bien plus difficile encore, et serait d’ailleurs probablement à l’arrêt.
Le 12 mars, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a qualifié la situation de pandémie. Les pays ont alors commencé à fermer leurs frontières et à imposer des règles de distanciation sociale et des restrictions de déplacement pour tenter de contenir la propagation du virus. Malgré ces restrictions et le risque d’exposition au virus, nos syndicats et leurs membres, les gens de mer du monde entier, ont continué d’assurer leurs missions pour que nous parviennent les produits essentiels dont nous avons besoin au quotidien.
En gardant à l’esprit la santé et la sécurité des gens de mer, nous avons accepté le 17 mars de prolonger d’un mois les contrats des équipages, jusqu’au 16 avril. Ceci a fait l’objet d’un commun accord entre les syndicats des gens de mer et les sociétés signataires d’Accords ITF.
Puisque personne n’a jamais eu à gérer de pandémie par le passé, nous n’avions aucune idée de la durée de la crise, de sa gravité ou des mesures à adopter avec les employeurs et les gouvernements à mesure de l’évolution de la situation. La première préoccupation et priorité de l’ITF et de ses affiliés lorsqu’il a été décidé de prolonger les contrats des gens de mer, c’était de veiller à leur santé et à leur sécurité tout en permettant la continuité des déplacements maritimes.
Ceci s’est fait au prix d’un immense sacrifice pour de nombreux gens de mer et leurs proches, car les confinements et restrictions imposés par les gouvernements ont immédiatement suspendu les changements d’équipages internationaux. Nos gens de mer se sont vus dans l’impossibilité de rentrer chez eux ou d’être remplacés, et certains pays leur ont même refusé leur droit fondamental aux soins médicaux et dentaires d’urgence.
Fin avril, l’ITF a à nouveau accepté de prolonger les contrats pour 30 jours supplémentaires afin de pouvoir rencontrer et consulter les employeurs et les agences des Nations Unies en vue d’élaborer des protocoles assurant des changements d’équipages et déplacements en toute sécurité pendant la pandémie, et de continuer à donner l’assurance aux gouvernements que les changements d’équipages n’exacerberaient pas la propagation du virus.
Après des semaines d’intense travail de l’ITF et de beaucoup de ses affiliés des gens de mer, à développer des protocoles et à exercer des pressions sur les employeurs et les gouvernements, la communauté maritime internationale a finalement obtenu une « feuille de route » pour que les gouvernements puissent faciliter les changements d’équipages. Ensuite, le 5 mai, l’Organisation maritime internationale (OMI) a publié un plan en 12 étapes à l’intention de ses 174 États membres, concernant la façon de « redémarrer » les changements d’équipages pour que les gens de mer puissent débarquer, et que de nouveaux équipages puissent les remplacer. Hélas, cela ne signifie pas automatiquement que les restrictions seront levées immédiatement puisque chaque gouvernement doit mettre en place des processus et procédures pour organiser les relèves d’équipages, mais il s’agit d’un pas dans la bonne direction.
Après des mois de confinement, les gouvernements réfléchissent maintenant aux modalités de levée des restrictions et de réouverture progressive des commerces. Aujourd’hui plus que jamais, ces commerces ont besoin des gens de mer pour le transport de denrées alimentaires, de produits manufacturés et de matières premières.
Les employeurs ont demandé un nouveau prolongement des contrats d’équipages tandis que les gouvernements opérationnalisent les protocoles, mais l’ITF et ses affiliés ont estimé que celui-ci serait contre-productif et ont accepté une période de mise en œuvre des protocoles de 30 jours, du 15 mai au 15 juin. Pendant cette période, l’ITF attend des gouvernements des mesures concrètes pour faciliter les changements d’équipage. L’ITF évaluera la période de mise en œuvre le 1er juin pour s’assurer que les efforts n’auront pas été vains.
Pour les non-marins, il est difficile de s’imaginer à quoi ressemblent la vie et le travail en mer pendant six, huit ou même 10 mois. Pour les marins, c’est un style de vie, mais au terme de leur contrat, ils sont heureux de rentrer à la maison, ce qui est leur droit absolu au titre de la Convention sur le travail maritime 2006 (MLC) de l’Organisation internationale du travail.
Les marins sont, comme tout un chacun, impatients de pouvoir enfin revoir leur famille et leurs amis à mesure que les règles de confinement s’assouplissent. Toutefois, contrairement au reste de la population, il y a bien plus de deux mois qu’ils sont privés de ces contacts. Pour beaucoup de marins, cela fait près d’un an, voire plus.
Dans ses points presse quotidiens, le Directeur général de l’OMS appelle régulièrement à « l’unité nationale et à la solidarité internationale ». Pour les gens de mer engagés dans le commerce international, ceci s’est traduit par la fermeture des frontières nationales et l’attente qu’ils continuent de travailler pour la solidarité et le bien-être du reste du monde, sans que la réciproque soit vraie.
Soyez assurés que l’ITF et ses affiliés continueront d’exercer des pressions sur les agences des Nations Unies, les gouvernements et les employeurs pour prioriser la facilitation des changements d’équipages afin que cette question ne soit plus problématique. La communauté mondiale doit prendre ses responsabilités collectives et ne pas se contenter de reconnaître les gens de mer comme des « travailleurs clés », mais faire en sorte que leurs droits, tels qu’ils sont édictés dans les textes nationaux et internationaux comme la MLC de l’OIT, soient respectés.
Les héros de première ligne sont nombreux, des soignants et agents d’entretien aux personnels de l’alimentaire et des transports, dont les gens de mer. L’ITF et nos affiliés – vos syndicats – ne baisseront pas les bras tant que chaque marin ne sera pas rentré chez lui sain et sauf, et que la relève, qui aura attendu patiemment à la maison, ne sera pas arrivée, pour que le transport de marchandises puisse continuer partout dans le monde grâce à vous. Pour éviter toute interruption des flux commerciaux, il est vital que les gouvernements du monde entier organisent sans plus tarder les changements d’équipages.
Nous continuons à vous informer de nos initiatives sur notre page spéciale Covid-19 et le site Internet des gens de mer de l’ITF, ainsi que sur nos réseaux sociaux.
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