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OBSERVATOIRE DES DROITS DES MARINS - PAQUEBOT CONFINÉ À SAINT-NAZAIRE : LE CELEBRITY APEX

Information générale

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08/05/2020

 Le Centre de Droit Maritime et Océanique de l’université de Nantes vient de mettre en ligne le dernier numéro de sa e-revue Neptunus, qui fonctionne depuis 26 ans. 

Notamment un article de Michel MORIN : « Le navire en attente de livraison, une zone de non-droit ?  

Le cas du Celebrity Apex » 

Neptunus e.revue, Années 2020 www.cdmo.univ-nantes.fr  

Université de Nantes, vol. 26, 2020/ 2  


Résumé : Le 24 mars 2020, alors que les Français vivaient depuis une semaine sous le régime du confinement, que toutes les fêtes et rassemblement divers avaient été annulés, le journal local (Ouest-France) a relaté que, sur le Celebrity Apex, navire de croisière en attente de livraison à son propriétaire et amarré à un quai des bassins à flot de Saint-Nazaire, dont l’équipage comprend près de 1500 personnes, il y avait eu le 21 mars une fête « gigantesque » à bord ; pour preuve, l’article contenait un lien vers une vidéo diffusée sur le réseau Snapchat. Malheureusement, quelques jours plus tard, des symptômes du covid-19 sont apparus chez plusieurs membres d’équipage. Le même journal, le 26 mars, faisait état de la présence de sept personnes atteintes, de sept autres cas probables, et de 78 personnes présentant des symptômes pouvant être ceux du covid-19. Puis le 31 mars, il indiquait que 734 personnes avaient été testées à bord et que 157 étaient contaminées. Ce navire était devenu en quelques jours un foyer significatif du Covid-19, un cluster. 

  

Actuellement, début mai, la situation semble s’y être stabilisée. Toujours selon le même journal, à la date du 23 avril, parmi les 863 personnes restant à bord, il n’y aucun malade bien qu’il y ait parmi celles-ci des personnes qui ont été testées positives mais qui ne présentent aucun symptôme ou ont été guéries. Ce navire, construit par les Chantiers de l’Atlantique, devait être livré à l’armateur, Celebrity Cruises qui est une compagnie américaine filiale de RCCL (Royal Caribbean Cruise Line), le 20 ou 21 mars. Cependant, cela ne s’est fait que le 27 mars. Ce navire est enregistré sous le pavillon de Malte.  

  

Michel MORIN envisage le statut de ce navire au 21 mars 2020,, à quai en attente de changement de pavillon vers Malte. L’arrêté ministériel du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19, arrêté dressant une liste d’établissements accueillant du public, était en principe applicable : « tout rassemblement, réunion ou activité mettant en présence de manière simultanée plus de 100 personnes en milieu clos ou ouvert, est interdit sur le territoire de la République jusqu’au 15 avril 2020 » (ce fut ensuite prolongé). La loi n° 2020-290 du 23 mars, intitulée « loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 », qui a notamment institué dans le code de la santé publique un chapitre intitulé « Etat d’urgence sanitaire » (articles L. 3131-12 à L. 3131-20) a « solidifié cet arrêté ministériel, en quelque sorte.  

Un arrêté de confinement a été pris par le préfet de Loire-Atlantique le 25 mars 2020, modifié par un arrêté préfectoral du 30 mars : les personnes à bord du navire sont mises en quarantaine avec interdiction de quitter le bord sans autorisation médicale et elles ne peuvent le quitter qu’avec une autorisation de l’autorité administrative.  





Une action de groupe (class action) a été lancée aux USA contre Celebrity Cruises par un cabinet d’avocats de Miami au nom d’une serveuse bulgare du Celebrity Apex, Alexandra N., qui a contracté le covid-19 (Demande accessible en ligne à https://www.lipcon.com/work-in-progress/complaint-celebrity-coronavirus/ ). A cette action de groupe, introduite auprès de la District Court de Miami, peuvent se joindre tous les autres membres d’équipage se trouvant dans une situation similaire et travaillant sur l’ensemble des navires de la compagnie Celebrity Cruises.  

Cette action de groupe reproche à la compagnie d’avoir ignoré de manière flagrante les directives du 18 février pour la gestion des soupçons de cas de covid-19 à bord des navires (Interim Guidance for ships - https://www.cdc.gov/quarantine/maritime/recommendations-for-ships.html) et l’ordre du 14 février de ne pas appareiller (No sail Order - https://www.cdc.gov/quarantine/pdf/signed-manifest-order_031520.pdf), deux textes adoptés par l’organisme fédéral CDC (Centers for disease control and prevention). Selon cette plainte, Celebrity Cruises, dont le principal établissement est à Miami, connaissait ces textes ou, pour le moins, devait les connaître, notamment en considérant que l’ensemble du secteur de la croisière avait reçu une alerte précoce début février quand les premiers cas de cette maladie sont apparus sur le Diamond Princess, navire appartenant à Princess Cruise Lines qui est une filiale de Carnival Corporation, l’autre grande compagnie de croisière américaine. Une autre alerte a ensuite été adressée au secteur de la croisière au moment de l’apparition de cas de covid-19 sur le Grand Princess fin février.  

La compagnie a décidé de limiter à bord, sans toutefois prendre de mesure stricte, les déplacements non essentiels du personnel sur le navire ou à l’extérieur. Malgré ces soupçons de présence à bord du covid-19, du 17 au 20 mars, des contractants indépendants ont continué à aller et venir sur le navire puis, le 21 mars, l’équipage a participé à des exercices obligatoires. Enfin, en soirée de ce 21 mars, il y a eu la crew party qui a été dévoilée à l’extérieur par Snapchat. La plaignante, Alexandra N., a été testée positive pour le covid-19 le 30 mars et, au 6 avril, environ 350 membres de l’équipage l’ont aussi été testés.  

Il est précisé que les plaignants ont des contrats individuels ou des contrats collectifs (Collective Bargaining Agreements) qui prévoient que les litiges entre la compagnie et le personnel sont soumis à l’arbitrage. Toutefois, la plainte indique qu’aucun de ces contrats ne prévoit qu’une class action soit soumise à l’arbitrage. Cette question de la compétence de la cour de Miami sera certainement la première à résoudre puisque Celebrity Cruises fera sans aucun doute valoir que ce sont les clauses d’arbitrage qui s’appliquent. 

  

Fin avril, au moins une vingtaine de class actions ont déjà été lancées contre Carnival par des passagers qui ont subi le confinement à bord de paquebots, ou qui ont contracté la maladie. Dans ce cas-là, l’action ne se pose pas dans les mêmes termes juridiques, puisque les demandes ne seront pas basées sur le Jones Act (Newsletter https://gcaptain.com, billet du 29/04/2020, Class action suits face uphill battle against cruise line). 

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