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LE RAPPORT D’ALLIANZ 2022 SUR LA SÉCURITÉ MARITIME

Sécurité, Sûreté

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18/05/2022

Le rapport de l'assureur Allianz souligne le nombre important d'incendies. Nous en avons relatés un certain nombre dans la partie "Mer et médias" de nos MMI.




Le secteur du transport maritime international est responsable du transport d'environ 90 % du commerce mondial ; la sécurité des navires est donc essentielle. Au début des années 1990, la flotte mondiale perdait plus de 200 navires par an. Ce chiffre est tombé à environ 50-75 par an au cours des quatre dernières années - une statistique d'autant plus impressionnante que la flotte mondiale compte aujourd'hui environ 130 000 navires (de plus de 100 tonnes de jauge brute [GT]), contre 80 000 il y a 30 ans.


Le sud de la Chine, l'Indochine, l'Indonésie et les Philippines constituent le principal foyer de sinistres au niveau mondial, avec un sinistre sur cinq (12), bien que l'activité ait diminué d'une année sur l'autre. Le golfe Persique (9) a connu une augmentation significative de l'activité de pertes pour se classer au deuxième rang devant la région de la Méditerranée orientale et de la mer Noire au troisième rang (7). Les eaux de l'Asie du Sud-Est sont également le principal lieu de sinistre de la dernière décennie (225 sur 892), en raison de facteurs tels que le niveau élevé du commerce local et international, l'encombrement des ports, l'ancienneté des flottes et les conditions météorologiques extrêmes.

Les navires de charge ont représenté la moitié de tous les navires perdus en 2021 (27). Le naufrage a été la principale cause des pertes totales pour tous les types de navires en 2021, représentant environ 60% (32). Les incendies/explosions viennent en deuxième position (15 %, 8), et les dommages/défaillances des machines en troisième position (11 %, 6). Des conditions météorologiques extrêmes ont été signalées comme étant un facteur dans au moins 13 sinistres en 2021, tandis que décembre et mai ont été les mois les plus fréquents pour les sinistres, avec respectivement sept sinistres chacun. Collectivement, le naufrage (52 %), le naufrage/échouement (18 %) et l'incendie/explosion (13 %) sont les trois principales causes de pertes totales au cours de la dernière décennie, représentant plus de 80 % des 892 pertes signalées.


Retrouvez le rapport complet en pièce-jointe.


Les sinistres maritimes sont en baisse. Mais la guerre en Ukraine, les coûts des grands navires, l’explosion du transport et les préoccupations environnementales brouillent l’horizon.

·         Rapport annuel sur la sécurité maritime 2022 : 54 grands navires perdus dans le monde l’année dernière. Les pertes totales chutent de 57 % sur 10 ans. La région maritime de la Chine méridionale, de l’Asie du Sud-Est, de l’Indonésie et des Philippines est la plus exposée au monde. Les îles Britanniques enregistrent le plus grand nombre d’incidents maritimes.

·         L’invasion de l’Ukraine a de multiples répercussions : pertes de vies humaines et de navires, intensification de la crise des équipages, perturbations des échanges, poids des sanctions, coût et disponibilité du combustible de soute.

·         Les incendies et événements de mer sur les porte-conteneurs et les rouliers entraînent des sinistres de grandes dimensions. Les procédures d’avarie commune sont de plus en plus fréquentes. Les préoccupations de développement durable augmentent les frais de sauvetage et d’enlèvement d’épave. La décarbonation du secteur maritime crée de nouveaux risques.

·         Impact du boom du transport sur la sécurité : l’utilisation croissante de navires inappropriés pour transporter des conteneurs, l’allongement de la durée de vie utile des navires et la saturation des ports mettent à dure épreuve les équipages et les installations.

 

Paris, le 10 mai 2022: Le secteur maritime réalise près de 90 % du transport international de marchandises. La sécurité des navires est donc essentielle. À cet égard, la tendance positive à long terme s’est poursuivie. Toutefois, l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la multiplication des incidents coûteux liés aux grands navires, la pénurie d’équipages, la saturation des ports liée à l’explosion du transport et les difficultés de réalisation des objectifs de décarbonation ne laissent peu de place à l’optimisme, selon le Rapport annuel sur la sécurité maritime 2022 de l’assureur maritime Allianz Global Corporate & Specialty SE (AGCS).

« Le secteur maritime a très bien résisté aux difficultés de ces dernières années, comme en témoigne la forte reprise de l’activité dans plusieurs segments, indique le capitaine Rahul Khanna, directeur mondial du conseil en risques maritimes chez AGCS. Les pertes totales atteignent des niveaux historiquement bas, avec des chiffres de 50 à 75 par an sur les quatre dernières années, contre plus de 200 par an dans les années 1990. Cependant, la situation tragique en Ukraine a bouleversé le transport maritime en mer Noire et ailleurs. Elle a aggravé les perturbations des chaînes d’approvisionnement, la congestion des ports et la crise des équipages causées par la pandémie de Covid-19. Parallèlement, certaines mesures prises par le secteur pour faire face au boom du transport, comme le changement d’usage ou l’allongement de la durée de vie utile des navires sont des signes alarmants. En outre, les armateurs et les équipages sont de plus en plus souvent confrontés aux problèmes posés par les grands navires, tels que les incendies, les échouements et les opérations de sauvetage complexes. »

L’étude annuelle d’AGCS analyse les pertes et les incidents déclarés sur des navires de plus 100 tonnes brutes. En 2021, 54 pertes totales ont été déclarées dans le monde, contre 65 l’année précédente. Cela représente une baisse de 57 % sur 10 ans (127 en 2012). Par comparaison, au début des années 1990, la flotte mondiale perdait plus de 200 navires par an. La baisse du nombre de pertes totales en 2021 est d’autant plus notable qu’on compte actuellement quelque 130 000 navires, contre 80 000 il y a 30 ans. Elle reflète l’intérêt porté aux mesures de sécurité, telles que les formations et les programmes en la matière, l’amélioration de la conception des navires, les progrès technologiques et le renforcement de la réglementation.

Selon le rapport, il s’est produit près de 900 pertes totales sur les dix dernières années (892). La région maritime de la Chine méridionale, de l’Asie du Sud-Est, de l’Indonésie et des Philippines est la plus exposée au monde, avec un sinistre sur cinq en 2021 (12) et un sur quatre dans la dernière décennie (225). Les facteurs qui l’expliquent sont notamment l’augmentation des échanges, la saturation des ports, le vieillissement des flottes et les événements météorologiques extrêmes. Dans le monde, les cargos (27) représentent la moitié des navires perdus l’année dernière et 40 % sur la décennie. La perte par le fond constitue la première cause de perte totale en 2021, avec une part de 60 % (32).

Si le nombre de pertes totales a diminué au cours de l’année dernière, les événements de mer déclarés ont augmenté. Les îles Britanniques ont subi le plus grand nombre d’incidents (668 sur 3 000). Les bris de machines ont provoqué plus d’un incident sur trois dans le monde (1 311), suivis des collisions (222) et des incendies (178). Ces derniers ont augmenté de près de 10 %.

 

Impact de la guerre en Ukraine sur la sécurité et l’assurance

À la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le secteur maritime a été touché sur plusieurs fronts : pertes de vies humaines et de navires en mer Noire, perturbations des échanges, poids croissant des sanctions. Il a également été confronté à des défis opérationnels quotidiens : crise des équipages, prix et disponibilité du combustible de soute, hausse des risques cyber.

La guerre en Ukraine a également eu des conséquences sur la main-d’œuvre du secteur maritime, qui connaissait déjà des pénuries. Le personnel russe représente un peu plus de 10 % du nombre de marins dans le monde, qui s’élève à 1,89 million, et le personnel ukrainien, environ 4 %. Ces professionnels pourraient rencontrer de multiples difficultés pour rentrer chez eux ou rejoindre leurs navires, à la fin de leurs contrats. Parallèlement, la prolongation du conflit pourrait avoir des répercussions graves, susceptibles de transformer durablement le commerce mondial de l’énergie et autres matières premières. Une interdiction de grande ampleur des importations de pétrole russe pourrait accentuer la hausse des prix et la baisse de disponibilité du combustible de soute. Elle pourrait pousser les armateurs à utiliser des carburants alternatifs qui, s’ils sont de qualité inférieure, pourraient causer des bris de machines. Par ailleurs, les autorités chargées de la sécurité continuent d’alerter sur l’augmentation des risques cyber dans le secteur maritime, tels que le brouillage du GPS, l’usurpation du système d’identification automatique et les interférences électroniques.

« Les assureurs devraient recevoir plusieurs demandes d’indemnisation au titre des risques de guerre, pour les navires endommagés ou perdus en raison de mines sous-marines, de tirs de missiles et de bombardements dans les zones de conflit, explique Justus Heinrich, directeur mondial des produits d’assurance maritime chez AGCS. Des demandes d’indemnisation au titre des risques de guerre maritime, pour les navires et les cargaisons bloqués ou pris au piège dans les ports et les eaux côtières de l’Ukraine, pourraient également leur être adressées. »

L’évolution des paquets de sanctions prises contre les intérêts russes est une autre question importante. La violation des sanctions est passible de mesures sévères, alors que la vérification de la conformité représente une tâche considérable. Il peut être difficile d’établir l’identité des principaux armateurs, chargeurs ou contreparties. Les sanctions s’appliquent également à différents maillons de la chaîne d’approvisionnement du transport, y compris la banque et l’assurance, ainsi que les services de soutien maritime. La conformité n’en est que plus complexe.

 

Incendies à bord des navires

L’année dernière, le roulier Felicity Ace et le porte-conteneurs X-Press Pearl ont été déclarés en perte totale à la suite d’un incendie à bord. De fait, les incendies de cargaison sont un sujet de préoccupations majeur. Selon le rapport, plus de 70 incendies ont été déclarés dans les cinq dernières années, pour les seuls porte-conteneurs. Le feu se déclenche souvent dans un conteneur. Il peut être dû à l’absence ou à l’irrégularité de déclaration de marchandises dangereuses, notamment de produits chimiques ou de batteries. Environ 5 % des conteneurs transportés pourraient contenir des marchandises dangereuses non déclarées. Sur les grands navires, le feu peut se propager rapidement et être difficile à maîtriser. L’équipage abandonne alors fréquemment le navire, ce qui peut accroître sensiblement le coût total de l’incident.

Le feu est aussi devenu un important facteur de sinistres sur les rouliers. Il peut démarrer notamment dans les soutes, à la suite de dysfonctionnements ou d’un court-circuit sur les véhicules. Les ponts ouverts favorisent alors la propagation de l’incendie. L’augmentation du nombre de véhicules électriques transportés par mer soulève aussi des difficultés. En effet, les systèmes de lutte contre l’incendie existants ne sont pas toujours efficaces en cas d’incendie d’un véhicule électrique. Les sinistres peuvent être coûteux, compte tenu de la valeur de la marchandise, ainsi que des frais d’enlèvement de l’épave et de réduction de la pollution.

Lorsqu’un grand navire est en difficulté, l’organisation des secours et la recherche d’un port de refuge peuvent être complexe. Le recours nécessaire à des équipements spécialisés, tels que remorqueurs, grues, barges et infrastructures portuaires, augmente les délais et les coûts d’intervention. Le cas du X-Press Pearl représente l’un des nombreux incidents dans lesquels des porte-conteneurs ont eu des difficultés à trouver un abri. Ce navire en feu a coulé après s’être vu refuser l’accès à deux ports, qui ne pouvaient ou ne souhaitaient pas gérer une fuite de cargaison d’acide nitrique. Par ailleurs, le sauvetage du roulier Golden Ray, qui a chaviré aux États-Unis en 2019, a pris près de deux ans et a coûté plus de 800 millions de dollars.

« Ce qui devrait être un incident gérable s’achève trop souvent sur un grand navire par une perte totale. Le sauvetage soulève une préoccupation majeure. Les questions environnementales contribuent à la hausse des coûts de sauvetage et d’enlèvement d’épave. En effet, les armateurs et les assureurs sont tenus d’effectuer des efforts supplémentaires pour protéger l’environnement et l’économie locale, explique Rahul Khanna. Auparavant, les épaves pouvaient être laissées sur place, si elles ne présentaient aucun danger pour la navigation. Aujourd’hui, les autorités exigent leur enlèvement et la restauration de l’environnement marin, quel qu’en soit le coût. »

Les chargeurs et leurs assureurs supportent de plus en plus la hausse des frais de sauvetage, et plus généralement du montant des sinistres. « La procédure dite d’avarie commune, par laquelle les chargeurs partagent au prorata les dommages et les frais de sauvetage, est devenue un événement fréquent et grave, avec la multiplication des grands porte-conteneurs impliqués dans un incendie, un échouement ou une avarie depuis cinq ans », explique Régis Broudin, directeur mondial Assurance maritime chez AGCS. Cette procédure a été utilisée pour les incidents des navires Ever Forward et Ever Given. Le grand porte-conteneur Ever Forward s’est échoué aux États-Unis en mars 2022. Il y est resté pendant plus d’un mois avant d’être renfloué, presque un an après le blocage de son jumeau, Ever Given, dans le canal de Suez.

 

De nouveaux risques dans l’après-Covid

La pandémie de Covid-19 a entraîné peu de sinistres directs dans le secteur de l’assurance maritime. En revanche, l’impact sur le bien-être des équipages, le boom du transport maritime et la congestion des ports soulèvent des préoccupations de sécurité. La demande d’équipages est élevée, alors que de nombreux marins qualifiés et expérimentés quittent la profession. Une grave pénurie d’officiers est prévue dans les cinq prochaines années.

Pour le personnel restant, le moral est en berne, compte tenu de la hausse des pressions commerciales, des obligations de conformité et des charges de travail. De telles conditions favorisent l’erreur humaine qui, selon l’analyse d’AGCS, serait impliquée dans 75 % des incidents maritimes.

La reprise économique postérieure à la pandémie a relancé le transport maritime. Les taux d’affrètement et de fret enregistrent une croissance record. C’est une bonne nouvelle sur le plan économique pour les entreprises de transport. Mais l’augmentation du transport de marchandises et la saturation de la capacité en porte-conteneurs poussent certains opérateurs à utiliser des vraquiers ou à envisager de convertir des pétroliers pour embarquer des conteneurs. Ce transport soulève des préoccupations concernant la stabilité des navires, les moyens de lutte contre l’incendie et le calage des marchandises. En effet, les vraquiers ne sont pas conçus à cet usage. Les caractéristiques de manœuvre du navire par mauvais temps peuvent en être modifiées. En outre, les équipages ne sont pas toujours préparés pour réagir de manière appropriée en cas d’incident.

Face à l’augmentation de la demande de transport, certains armateurs tentent également de prolonger la durée de vie utile des navires. Déjà avant la pandémie, l’âge moyen des navires était en hausse. Or s’il existe de nombreuses flottes vieillissantes bien gérées et entretenues, les porte-conteneurs et les cargos âgés de 15 à 25 ans sont plus susceptibles de subir un sinistre. Les raisons en sont la corrosion, mais aussi les systèmes et les machines, plus souvent défaillants. Sur la décennie, l’âge moyen d’un navire déclaré en perte totale est de 28 ans.

 

Goulets d’étranglement et saturation des ports

L’instauration de nouvelles restrictions sanitaires en Chine, la hausse de la consommation et l’invasion de l’Ukraine sont autant de facteurs qui expliquent la saturation inédite des ports. Cette situation exerce une pression supplémentaire sur les équipages, les dockers et les installations. « Le chargement et le déchargement des navires sont des opérations particulièrement risquées, où la moindre erreur peut avoir de graves conséquences. Les ports à conteneurs très sollicités disposent de peu d’espaces libres et manquent de professionnels qualifiés pour la manutention des conteneurs. Si on ajoute à cela les délais de rotation rapides, on comprend que les risques aient augmenté, » souligne Justus Heinrich.

 

Questions liées à la transition climatique

Selon le rapport, les efforts à l’échelle mondiale pour lutter contre le changement climatique prennent de l’ampleur et les pressions s’accentuent sur le secteur maritime pour qu’il intensifie ses mesures en faveur du développement durable. Ses émissions de gaz à effet de serre ont augmenté d’environ 10 % entre 2012 et 2018.

La décarbonation demandera d’importants investissements dans les technologies vertes et les carburants alternatifs. Un nombre croissant de navires passe au gaz naturel liquéfié (GNL). Par ailleurs, des carburants de substitution sont en cours de développement, comme l’ammoniac, l’hydrogène et le méthanol. Les navires à propulsion électrique sont également à l’étude. Le passage aux carburants alternatifs pourrait accroître notamment les risques de bris de machine, en attendant que les technologies soient éprouvées et que les équipages s’adaptent aux nouvelles procédures.

 

Commentaires de l'Antenne:

2022 voit se multiplier les risques dans le shipping 

Dans son dernier rapport annuel sur la sécurité maritime, Allianz constate une nette amélioration du nombre pertes de navires dans le monde mais a vu poindre au cours des derniers mois de nouveaux dangers pour le secteur, conséquences, notamment, de la guerre en Ukraine et de la pandémie.

Sur fond de tendances lourdes, les risques maritimes évoluent sans cesse, au gré d'événements imprévisibles. L'édition 2022 du rapport de l'assureur Allianz Global Corporate & Specialty SE (AGCS) sur la sécurité maritime présente ainsi des tendances opposées.

Moins de pertes totales, plus de bris 

Ainsi, le document, qui analyse les pertes et incidents déclarés sur des navires de plus 100 tonnes brutes, débute par un satisfecit. "Le secteur maritime a très bien résisté aux difficultés de ces dernières années, comme en témoigne la forte reprise de l’activité dans plusieurs segments, estime le capitaine Rahul Khanna, directeur mondial du conseil en risques maritimes chez AGCS. Les pertes totales atteignent des niveaux historiquement bas, avec des chiffres de 50 à 75 par an sur les quatre dernières années, contre plus de 200 par an dans les années 1990".

En 2021, 54 pertes totales ont été déclarées dans le monde, contre 65 l'année précédente, ce qui représente une baisse de 57 % en dix ans (127 en 2012). "La baisse du nombre de pertes totales en 2021 est d’autant plus notable qu’on compte actuellement quelque 130.000 navires, contre 80.000 il y a trente ans", relève l'assureur maritime, qui y voit les conséquences de l'intérêt porté aux mesures de sécurité, notamment dans la formation, la conception des navires, le niveau technologique et la réglementation. Dans le monde, les navires de charge (27) représentent la moitié des unités perdues l'an dernier et 40 % sur la décennie.

En revanche, les événements de mer déclarés ont augmenté. Les bris de machines ont provoqué plus d’un incident sur trois dans le monde (1.311), suivis des collisions (222) et des incendies (178), ces derniers ayant augmenté de près de 10 %.

Le conflit accentue la pression humaine et technique 

Parmi les dangers nouveaux, l'invasion de l'Ukraine par la Russie a eu une cascade de conséquences sur la sécurité maritime : pertes de vies humaines et de navires en mer Noire, perturbations des échanges et poids croissant des sanctions. Allianz souligne que le conflit a aussi imposé défis opérationnels quotidiens avec la crise des équipages, le prix et la disponibilité du combustible et la hausse des risques cyber.

La pénurie de main-d’œuvre que connaissait déjà le secteur s'aggrave, le personnel russe représentant plus de 10 % du nombre mondial de marins (1,89 million) et le personnel ukrainien, environ 4 %. S'agissant de l’énergie, la raréfaction des sources d'approvisionnement pourrait mener, selon le rapport, à l'utilisation de carburants alternatifs qui, "s’ils sont de qualité inférieure, pourraient causer des bris de machines".

Franck André Vendredi 13 Mai 2022 L'antenne Enfin, sur le plan cyber, les brouillages de GPS, l’usurpation du système d’identification automatique (AIS) et les interférences électroniques sont les principales menaces.

Des incendies plus fréquents et difficiles à traiter 

Les incendies de cargaison sont un autre sujet majeur de préoccupations, selon Allianz. L'an dernière, le roulier "Felicity Ace" et le porte-conteneurs "X-Press Pearl" ont été déclarés en perte totale après un incendie à bord. Selon le rapport, plus de 70 incendies ont été déclarés dans les cinq dernières années pour les seuls porte-conteneurs.

Le feu se déclenche souvent dans un conteneur, parfois en raison d'une absence ou d'une l’irrégularité de déclaration de marchandises dangereuses, notamment de produits chimiques ou de batteries, explique le document. Les experts d'Allianz estiment qu'"environ 5 % des conteneurs transportés pourraient contenir des marchandises dangereuses non déclarées".

"La saturation de la capacité en porte-conteneurs poussent certains opérateurs à utiliser des vraquiers ou des pétroliers" 

De plus, le feu est aussi devenu un important facteur de sinistres sur les rouliers et la taille des navires complique l'organisation des secours et la recherche d’un port de refuge. Le "X-Press Pearl" a, par exemple, coulé après s’être vu refuser l’accès à deux ports, qui ne pouvaient ou ne souhaitaient pas gérer une fuite de cargaison d'acide nitrique. Par ailleurs, le sauvetage du roulier "Golden Ray", qui a chaviré aux États-Unis en 2019, a pris près de deux ans et a coûté plus de 800 millions de dollars, rappelle l'assureur.

"Les questions environnementales contribuent à la hausse des coûts de sauvetage et d’enlèvement d’épave, explique Rahul Khanna. Auparavant, les épaves pouvaient être laissées sur place, si elles ne présentaient aucun danger pour la navigation. Aujourd’hui, les autorités exigent leur enlèvement et la restauration de l’environnement marin, quel qu’en soit le coût."

Le Covid-19 n'en a pas fini avec le secteur 

Bien sûr, le Covid-19 a lui aussi laissé des traces question sécurité maritime. Si elle a "entraîné peu de sinistres directs dans le secteur de l’assurance maritime", la pandémie a eu un impact sur le bien-être des équipages, l'offre et la demande de transport maritime et la congestion des ports, qui, eux, soulèvent des préoccupations de sécurité. L'assureur pointe ainsi la forte demande d'équipages tandis que de nombreux marins qualifiés quittent la profession, à tel point qu'"une grave pénurie d’officiers est prévue dans les cinq prochaines années". La surcharge de travail qui en résulte "favorise l'erreur humaine qui, selon l’analyse d’AGCS, serait impliquée dans 75 % des incidents maritimes".

D'autre part, l'augmentation de la sollicitation du transport de marchandises et la saturation de la capacité en porte-conteneurs "poussent certains opérateurs à utiliser des vraquiers ou à envisager de convertir des pétroliers pour embarquer des conteneurs". Cela pose des questions pratiques de stabilité des navires, d'arrimage des marchandises, de moyens de lutte contre l'incendie, de manœuvrabilité et de formation des équipages. La tentation d’augmenter la durée de vie des navires représente un autre danger lié à la situation de sous-capacité du secteur. Avant la pandémie, la tendance était déjà à un vieillissement de la flotte, rappelle AGCS. Selon son rapport annuel, au cours de la dernière décennie, l'âge moyen d’un navire déclaré en perte totale est de 28 ans.

Congestion des ports et développement durable 

Les nouvelles restrictions sanitaires en Chine, la hausse de la consommation et la guerre en l'Ukraine "sont autant de facteurs qui expliquent la saturation inédite des ports". D'où une pression supplémentaire sur les équipages, les dockers et les installations.

"Le chargement et le déchargement des navires sont des opérations particulièrement risquées, où la moindre erreur peut avoir de graves conséquences. Les ports à conteneurs très sollicités disposent de peu d'espaces libres et manquent de professionnels qualifiés pour la manutention des conteneurs. Si on ajoute à cela les délais de rotation rapides, on comprend que les risques aient augmenté", souligne Justus Heinrich, directeur mondial des produits d’assurance maritime chez AGCS.

Le rapport prend enfin en compte les mesures prises en faveur d'un développement durable et les pressions qui s’accentuent sur le secteur maritime, dont les émissions de gaz à effet de serre ont crû de 10 % entre 2012 et 2018. Encore une fois, il y trouve matière s'inquiéter : "le passage aux carburants alternatifs pourrait accroître notamment les risques de bris de machine, en attendant que les technologies soient éprouvées et que les équipages s'adaptent aux nouvelles procédures", estime ainsi l'assureur. Une façon de justifier l'emballement des taux de fret et des surcharges qui l'accompagnent ?

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